La question des changements climatiques fait désormais partie du quotidien de tous les Canadiens. Nous en entendons parler tous les jours dans les médias et nous savons que nous devons nous y adapter, mais aussi agir pour en amoindrir les conséquences. Mais comment ? Devant la complexité de la problématique, il est facile de se sentir dépassé et d’éprouver un sentiment d’impuissance.
En effet, les consommateurs savent qu’ils ont un rôle à jouer, mais ce rôle et la façon de le jouer apparaissent encore difficiles à cerner. Le consommateur canadien a-t-il en main tous les outils, l’information, les moyens de se préparer ou de faire des choix de consommation écoresponsables et éclairés ?
Nous avons choisi d’examiner ces questions en fonction de quatre postes budgétaires : l’alimentation, les transports, le logement et l’épargne. Les trois premiers sont les plus importants en termes d’empreinte carbone ; le quatrième peut constituer, pour le consommateur, un moyen d’action important. Des constats et les priorités d’action pour chacun de ces postes budgétaires sont présentés dans la recherche.
Il faut bien comprendre que nous n’avons pas étudié ce que le consommateur devrait avoir comme rôle en matière de lutte aux changements climatiques, ce qui est largement documenté, mais bien ce qu’il peut concrètement faire en 2019, dans son milieu de vie, au Canada.
Parmi les recommandations adressées aux consommateurs en vue de protéger la planète, il y en a trois qui, d’après les chercheurs, ont le plus grand impact en termes de réduction des GES : renoncer à la voiture, renoncer à l’avion, et renoncer aux protéines animales. Or, on constate dans les trois cas, à l’arrière-plan, des décisions structurantes prises par l’État et l’industrie qui limitent la capacité du consommateur de suivre ces recommandations, ainsi qu’une absence presque complète d’information crédible, d’incitatifs, et de soutien qui lui permettraient de faire les choix requis.
Cela ne signifie pas que les consommateurs ne doivent pas tenter de modifier leurs habitudes pour faire face aux changements climatiques. Cependant, notre recherche démontre que le rôle des consommateurs est très dépendant de celui joué par les gouvernements et l’industrie. En clair, pour qu’une véritable lutte aux changements climatiques puisse se mettre en branle, les choix individuels doivent être facilités par des politiques gouvernementales et des incitatifs à l’action. Dans l’intervalle, les consommateurs canadiens peuvent certes adopter de nouvelles habitudes et en changer d’autres, mais ils seront contraints de le faire en fonction du contexte dans lequel ils vivent et devront parfois limiter leurs intentions d’agir par manque de possibilités de le faire dans leur milieu de vie.
L’autre grand constat de cette recherche concerne les inégalités observées dans l’application de plusieurs des mesures étudiées. Tous ne sont pas affectés au même degré par les conséquences du réchauffement climatique. D’une part, les consommateurs les plus aisés produisent beaucoup plus d’émissions que les plus pauvres, et peuvent donc, en réduisant leur consommation, avoir un impact important sur les GES sans en souffrir sur le plan matériel. D’autre part, comme le précise le dernier rapport du GIEC, les populations marginalisées au niveau social, économique, culturel, politique et institutionnel sont particulièrement vulnérables aux effets des changements climatiques. Mais il y a plus : les recommandations destinées aux consommateurs ne sont pas accessibles à tous sur le plan financier. L’installation d’un système géothermique ou l’achat d’une voiture électrique, par exemple, n’est pas à la portée de toutes les bourses — la moyenne des revenus après impôt de 40 % des ménages québécois est de moins de 36 500 $.
Union des consommateurs recommande donc au gouvernement fédéral canadien et aux gouvernements des provinces et des territoires du Canada de prendre la lutte aux changements climatiques au sérieux en y accordant la priorité, en y consacrant les ressources considérables qu’elle exige, en faisant preuve de cohérence, d’intégrité et de leadership en ce domaine, et en tenant compte des disparités sociales et économiques dans l’élaboration de ses politiques. L’État doit amorcer les changements structurels et systémiques qui permettront aux consommateurs de faire des choix qui susciteront une diminution marquée de leurs émissions de GES. Des interventions majeures pour diffuser l’information sur la nécessité d’accorder la priorité à un régime alimentaire à base de plantes, un cadre réglementaire conçu pour freiner l’étalement urbain, le financement massif des transports collectifs, la construction de lignes de trains rapides pouvant remplacer l’avion, un programme national d’aide à la rénovation écoénergétique, sont des mesures qui doivent faire partie des priorités de l’État, et qu’il doit entreprendre en y accordant les ressources nécessaires. En parallèle, l’État doit également abolir toutes les politiques qui favorisent les émissions de GES. C’est à cette condition seulement que les consommateurs canadiens pourront jouer le rôle qui leur revient en matière de lutte aux changements climatiques en réduisant massivement leurs émissions de GES afin d’éviter les pires effets du réchauffement planétaire.
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Changements climatiques : le rôle des consommateurs (Novembre 2019 – 140 pages)
Climate change: The role of consumers
Rapport de recherche réalisé par Union des consommateurs et présenté au Bureau de la consommation d’Innovation, Sciences et Développement économique Canada.
Union des consommateurs a reçu du financement en vertu du Programme de contributions pour les organisations sans but lucratif de consommateurs et de bénévoles d’Industrie Canada. Les opinions exprimées dans ce rapport ne sont pas nécessairement celles d’Innovation, Sciences et Développement économique Canada ou du gouvernement du Canada.