15 mars, Journée mondiale des DROITS des consommateurs

La Journée mondiale des droits des consommateurs est le moment de se rappeler le chemin parcouru. Plus de 70 ans après l’introduction de la première charte des droits des consommateurs aux États-Unis et plus de 50 ans après l’adoption, au Québec, de la Loi sur la protection du consommateur (LPC), la lutte pour les droits des consommateurs est toujours aussi pertinente. Alors que les défis se multiplient, que les commerçants et les prêteurs ne ménagent pas les efforts (et l’imagination) pour brouiller les cartes, chercher et exploiter les failles de la législation, et enfreindre les droits des consommateurs, nous sommes tentés de croire que la lutte est en fait plus pertinente que jamais!

Tout au long de l’année, mais aujourd’hui plus particulièrement, Union des consommateurs interpelle les élus, les corps policiers et les organismes réglementaires afin qu’ils agissent proactivement et vigoureusement pour mieux protéger les consommateurs, et prioritairement les plus vulnérables d’entre eux. Des gestes ont été posés, mais il reste encore beaucoup à faire. Union des consommateurs sera là pour le leur rappeler.

Pour souligner cette Journée mondiale des droits des consommateurs, nous avons cru bon partager avec vous un tour d’horizon des enjeux en droit de la consommation qui ont marqué la dernière année. Au menu : inflation, panier d’épicerie, hausse des taux d’intérêt, endettement et crédit à taux abusif, télécommunications, durabilité et réparabilité, et bien plus évidemment!

Bonne Journée mondiale des droits consommateurs à tous et toutes!


Survol de l’année

Des consommateurs sous pression

L’année écoulée a encore une fois été difficile pour les consommateurs, confrontés à une série de défis comme l’inflation, les taux d’intérêt élevés et la crise du logement. Tous ne sont pas égaux devant l’inflation : celle-ci touche plus fortement les ménages à faible revenu, dont au moins 55 % de leur revenu est destiné aux achats d’aliments en magasin et au logement, des postes de dépense particulièrement affectés par l’inflation. Non seulement leur budget est moins flexible, mais ils ont aussi moins bénéficié des hausses salariales obtenues dans la dernière année. En témoigne l’explosion du recours aux banques alimentaires, alors que 872 000 Québécois ont reçu de l’aide chaque mois, une augmentation de 30 % par rapport à 2022, et de 73 % depuis 2019[1].

L’endettement des ménages est aussi en hausse et le recours de plus en plus fréquent aux cartes de crédit, particulièrement pour les ménages à faible revenu, devrait inquiéter les autorités publiques. Des produits de petit crédit à faible coût et à conditions raisonnables doivent être offerts, et ce, particulièrement pour les ménages à faible revenu.

Pour prévenir l’endettement, rien de mieux que d’agir en amont. C’est pourquoi des mesures structurantes devront être prises afin de soutenir le pouvoir d’achat des ménages à court et à long terme :  augmentation du nombre de paliers d’imposition, abolition des taxes sur les biens et services essentiels, bonification substantielle des prestations sociales, couverture de tous les soins de santé (notamment les médicaments et les soins dentaires). Cette liste n’est évidemment pas exhaustive, mais elle constitue un bon point de départ.

La crise actuelle du coût de la vie a également mis en évidence la nécessité de vastes réformes dans deux secteurs où la situation est la plus critique : l’épicerie et les télécommunications. La concurrence y est anémique : au Canada, 5 épiciers contrôlent 76 % du marché alimentaire[2] et 4 fournisseurs de services de télécommunications collectent 87,3 % des revenus de ce marché[3]. Ce manque de concurrence a un impact direct sur le portefeuille des consommateurs canadiens, entraînant des prix élevés tant à l’épicerie que sur les factures de téléphone et d’Internet. Alors que les consommateurs peinent à payer ces services essentiels, une poignée d’entreprises continuent d’augmenter leurs marges de profit et d’engranger des milliards de dollars de bénéfices[4]. Il est plus que temps de repenser la réglementation de ces secteurs en faveur des consommateurs!

Enfin, les consommateurs veulent des biens durables et des garanties légales faciles d’application. Depuis les années 1970, la LPC garantit qu’un bien doit servir à un usage normal pendant une durée raisonnable. Cette protection vise à préserver les intérêts économiques des consommateurs qui ne devraient pas avoir à dépenser davantage pour remplacer des biens qui devraient raisonnablement toujours être fonctionnels. Pourtant, la réalité est toute autre. Électroménagers, ordinateurs, cellulaires, pour ne nommer que ceux-ci, sont régulièrement l’objet de bris prématurés, et les consommateurs sont souvent confrontés à un refus du commerçant de remplir ses obligations, par exemple, de réparer gratuitement le bien qui fait défaut. En 2023, le législateur a modifié la LPC afin d’y ajouter une garantie de bon fonctionnement pour laquelle une durée sera établie par règlement. Ce règlement n’a pas encore été adopté et est attendu avec impatience. Nous espérons que les consommateurs seront entendus et que la durée de la garantie de bon fonctionnement fera écho au souhait de durabilité des consommateurs et sera un réel rempart à la surconsommation. Malgré tout, nous restons convaincus que le recours à la garantie de bon fonctionnement aurait été facilité si le législateur avait détaillé explicitement les solutions offertes aux consommateurs et les délais à respecter par le commerçant lors de l’application de la garantie de bon fonctionnement. Favoriser la mise en œuvre des droits des consommateurs devrait être au cœur de toute réforme législative.

En cette journée mondiale des droits des consommateurs, nous demandons aux élus d’agir rapidement pour mieux protéger les consommateurs. Sans actions concrètes pour contrer les tendances actuelles, nous craignons un effritement majeur des droits des consommateurs dans les années à venir.

Nous en profitons également pour souligner le travail colossal effectué sur le terrain, tous les jours, par les associations du Québec, du Canada et de partout à travers le monde. Leur travail essentiel, « ça n’a pas de prix »! Il est plus que temps que les gouvernements le reconnaissent en leur accordant le soutien financier qu’elles méritent, et dont elles ont cruellement besoin pour accomplir efficacement leur mission.

[1] Les banques alimentaires du Québec, Bilan-Faim Québec 2023, 25 octobre 2023, URL: Bilan-Faim-2023_Final.pdf (banquesalimentaires.org) (consulté le 7 mars 2023).

[2]  United States Department of Agriculture: Foreign Agricultural Service, Canada: Retail Foods (juillet 2022). En ligne: https://fas.usda.gov/data/canada-retail-foods-6. Les cinq épiciers sont Loblaws, Sobeys, Metro, Costco et Walmart.

[3] Ce chiffre est basé sur les données de 2022. À l’époque, ce pourcentage du marché a été divisé entre cinq fournisseurs : Bell, TELUS, Rogers, Shaw et Vidéotron. Rogers et Shaw ont fusionné en 2023.  Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes, Faits saillants annuels du secteur des télécommunications (2022). En ligne:  https://crtc.gc.ca/eng/publications/reports/PolicyMonitoring/2023/tel.htm.

[4] Épiciers : « En 2022, les trois plus grandes chaînes d’épicerie du Canada, Loblaws, Sobeys et Metro, ont rapporté des ventes, mises ensemble, de plus de 100 milliards de dollars et ont réalisé plus de 3,6 milliards de dollars en bénéfices ». « Nous avons remarqué que les marges brutes des produits alimentaires des grands épiciers du Canada ont généralement augmenté de façon modeste, mais significative au cours des cinq dernières années. Cette tendance à long terme précède les perturbations de la chaîne d’approvisionnement rencontrées lors de la pandémie et la période inflationniste actuelle ». Gouvernement du Canada, Le Canada a besoin de plus de concurrence dans le secteur de l’épicerie :  Rapport de l’étude de marché sur l’épicerie de détail du Bureau de la concurrence (juin 2023). En ligne: https://ised-isde.canada.ca/site/bureau-concurrence-canada/fr/comment-nous-favorisons-concurrence/education-sensibilisation/canada-besoin-plus-concurrence-dans-secteur-lepicerie.