La publicité native est définie largement comme étant une publicité qui adapte sa forme selon la plateforme qui l’accueille. Elle vise principalement à se fondre dans le décor, afin d’être plus facilement acceptée (voire appréciée) par les consommateurs. Dans les médias d’information, la publicité native prend la forme d’un article journalistique, et on la nomme parfois publicité rédactionnelle.
La publicité native est une méthode de marketing actuellement en vogue auprès des annonceurs. Vu leur besoin de financement en provenance des annonceurs, les médias d’information adaptent donc leur offre publicitaire à leur demande. L’annonceur peut parfois : 1) commanditer un article éditorial, sans implication ou influence sur le contenu ; 2) être impliqué dans la rédaction d’une publicité rédactionnelle, de concert avec un journaliste ou un expert du marketing embauché par le média ; ou encore 3) rédiger son propre contenu et le publier dans un espace publicitaire sur le site Web du média d’information. Ces trois types d’offres publicitaires gardent en commun l’intégration visuelle du contenu sur la plateforme numérique du média d’information et l’utilisation de la mise en page qui est habituellement celle du contenu journalistique.
Malgré sa popularité, l’utilisation de la publicité native dans les médias d’information est controversée au sein de l’industrie de l’information, puisqu’elle engendre de sérieux problèmes éthiques. D’abord, l’effritement du mur étanche, qui, dans les médias, doit séparer l’éditorial du publicitaire expose les médias d’information à un potentiel conflit entre leurs intérêts économiques, les intérêts de l’annonceur et l’intérêt public, ce qui pourrait en outre mettre en péril l’indépendance des journalistes et ébranler la confiance du public à leur égard.
Diverses méthodes sont utilisées par les médias d’information pour distinguer les contenus publicitaires des contenus journalistiques ‒ la divulgation du caractère publicitaire devrait toujours être explicite, claire et sans ambiguïté. Or, notre recherche terrain nous a amené à constater que les bonnes pratiques constituent l’exception plutôt que la règle. Le lecteur pourra donc être manipulé par l’utilisation d’un discours incitatif qui prend la forme d’un article journalistique. Mais il y a pire : c’est le droit constitutionnel du public à une information indépendante et de qualité, assise fondamentale de l’exercice démocratique, qui est menacé.
Notre étude terrain révèle une large incompréhension des normes légales par les médias d’information et une inefficacité des organismes d’autoréglementation pour contrôler ceux qui emploient des pratiques répréhensibles. En effet, bien que certains médias optent pour de bonnes pratiques de divulgation, les pratiques de la grande majorité des quinze médias canadiens analysés ont été jugées répréhensibles.
La consultation des parties prenantes nous a permis de déceler certains consensus. Notamment, tous s’entendent sur l’importance de la transparence et la distinction entre l’information journalistique et la publicité. De plus, les parties prenantes sont, de façon générale, en accord avec les pratiques exemplaires et répréhensibles que nous avons identifiées. Cela dit, l’idée d’imposer un cadre légal et réglementaire en matière de publicité native a divisé les différents intervenants.
L’analyse des modèles législatifs étrangers nous a permis de constater l’existence d’interventions législatives intéressantes, qui mériteraient de servir d’exemple au Canada.
Enfin, en fonction de l’étude terrain et de notre analyse, nous estimons qu’un resserrement des normes et une intervention législative en matière de publicité native sont devenus nécessaires. Que ce soit pour établir un cadre normalisé en matière de divulgation du caractère publicitaire ou encore pour préserver, en pratique, une réelle séparation étanche entre l’éditorial et le publicitaire.
(extrait du sommaire exécutif)
Voir le rapport complet :
Publicité native : entre information et mirage (Juin 2018 – 162 pages)
Native Advertising : Information or Illusion (June 2018 – 156 pages)
Rapport de recherche réalisé par Union des consommateurs et présenté au Bureau de la consommation d’Innovation, Sciences et Développement économique Canada.
Union des consommateurs a reçu du financement en vertu du Programme de contributions pour les organisations sans but lucratif de consommateurs et de bénévoles d’Industrie Canada. Les opinions exprimées dans ce rapport ne sont pas nécessairement celles d’Innovation, Sciences et Développement économique Canada ou du gouvernement du Canada.