CRTC et pratiques de ventes abusives : des propositions nettement insuffisantes

Montréal, le 28 février 2019 – C’est avec une certaine ambivalence qu’Union des consommateurs (UC) accueille le Rapport sur les pratiques de vente au détail trompeuses ou agressives dans le secteur des communications, déposé le 20 février par le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC).

Rappelons que ce rapport a été commandé au CRTC par le gouverneur en conseil à la suite des reportages de la CBC, à l’automne 2017 et à l’hiver 2018, qui exposaient les techniques de vente douteuses de certains fournisseurs du secteur des communications – citant notamment des cas de vente à pression et des représentations fausses ou trompeuses.

UC, dans un récent rapport de recherche[1] et dans ses interventions au CRTC[2], a d’ailleurs mis en évidence plusieurs de ces pratiques douteuses : fausse garantie de prix, divulgation de prix inexacts, vente de services indisponibles, non désirés ou qui ne correspondent pas aux besoins exprimés, ventes à pression, etc.

UC se réjouit que le CRTC dénonce à son tour et qualifie d’inacceptable l’omniprésence de ces pratiques répréhensibles, dans tous les types de circuits de vente : en magasins, en ligne, par téléphone, par porte-à-porte. UC irait plus loin en ajoutant les publicités à cette liste des méthodes utilisées par les fournisseurs pour faire des représentations trompeuses.

Le CRTC reconnaît aussi que les consommateurs font face à des obstacles importants lorsqu’il est question de mettre fin à leur contrat, de changer de fournisseur, mais aussi lorsqu’ils ont à faire valoir leurs droits, du fait de l’inexistence ou de la méconnaissance des recours utiles.

Pour remédier à ces problèmes importants qui affectent près de 40 % des Canadiens, selon un sondage qu’il a commandé et sur lequel s’appuie le CRTC, ce dernier propose différentes pistes de solutions, curatives et préventives.

« On aurait été en droit de s’attendre à des propositions portant sur des mesures fermes et décisives, destinées à s’attaquer de front au problème. Malheureusement, certaines nous apparaissent mal ciblées. La volonté d’appliquer des mesures coercitives ou des sanctions aux entreprises fautives ne transparaît pas aussi clairement dans le rapport que nous l’aurions souhaité », soutient Anaïs Beaulieu-Laporte, analyste en télécommunications, radiodiffusion, Internet et vie privée à UC.

Premièrement, le CRTC suggère que soit prolongée la période d’essai que doit offrir le fournisseur de communications au moment de l’abonnement, afin de permettre aux consommateurs d’évaluer si le forfait choisi répond bel et bien à ses besoins. UC reconnaît l’utilité de ces périodes d’essai qui donnent au consommateur le droit de mettre fin au contrat sans aucuns frais s’ils sont insatisfaits ou s’ils changent d’idée suite à l’essai. Une prolongation de la portée de cette mesure qui existe déjà (pour certains services) pourrait être bénéfique, mais elle ne permettra tout de même pas au consommateur de déceler, par exemple, toutes les fausses représentations qui lui auraient été faites. Et il faut se rappeler que le droit de résiliation remet le consommateur face aux barrières que pose le changement de fournisseur.

Deuxièmement, le CRTC lance aussi l’idée d’imposer aux fournisseurs la remise, avant la conclusion du contrat, d’un document écrit où seraient détaillées les caractéristiques essentielles du service et du forfait. Un tel document permettrait au consommateur de voir en un coup d’œil ce à quoi le fournisseur et lui vont s’engager, et, idéalement, de comparer cette offre personnalisée avec les autres offres disponibles sur le marché et de faire ainsi un choix plus éclairé. UC insiste depuis longtemps pour que le CRTC impose cette obligation aux fournisseurs. Mais ici encore, l’effet sur les pratiques trompeuses ou abusives risque d’être fort limité.

Parmi les mesures préventives avancées par le CRTC on retrouve l’élaboration d’un guide des meilleures pratiques relativement aux représentations par les entreprises de communications, et l’adoption de normes sur lesquelles les fournisseurs pourraient s’appuyer pour assurer que les services qu’ils proposent aux consommateurs correspondent réellement à leurs besoins.

Ce type de mesures n’auront d’effet véritable que si les fournisseurs sont contraints de s’y conformer, si les consommateurs qui s’estiment lésés possèdent des recours, et si les fournisseurs fautifs sont punis.

Le CRTC laisse entendre que le mandat de la CPRST pourrait être élargi pour lui permettre de régler les litiges qui reposeraient sur des fausses représentations ou des ventes à pression. Ce type de recours nous semble tout à fait souhaitable, pourvu que le respect de ces codes, guides des meilleures pratiques et autres normes soit imposé à l’ensemble des fournisseurs.

« Afin d’assurer la protection du consommateur dans le secteur des communications, le gouvernement devrait s’assurer que le CRTC dispose de tous les outils nécessaires pour s’attaquer utilement à ces problèmes, dont, notamment, un large pouvoir d’imposer des sanctions administratives aux entreprises délinquantes », ajoute l’analyste en télécommunications.

Le gouvernement devrait aussi prendre acte du fait que le CRTC qualifie la situation d’inacceptable et encourager ce dernier à intervenir rapidement et fermement.

À propos d’Union des consommateurs
Union des consommateurs est un organisme sans but lucratif qui réunit treize associations de consommateurs. Sa mission est de promouvoir et de défendre les droits des consommateurs, en prenant en compte de façon particulière les intérêts des ménages à revenu modeste.

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Renseignements :
Karina Sanchez, chargée de communication
ksanchez@uniondesconsommateurs.ca
514 521-6820 poste 257

 

[1] Des rabais à quel prix ? Services de communication et prix promotionnels : l’heure des bilans. Novembre 2018. En ligne. https://bit.ly/2tEiNGq

[2] Observations initiales d’UC au CRTC – Pratiques de vente au détail des grandes entreprises de services de télécommunication canadiennes. Avis de consultation de télécom et de radiodiffusion CRTC 2018-246. En ligne. https://uniondesconsommateurs.ca/pratiques_de_vente_2018-246/