Le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) a annoncé hier la mise en place du Code sur les services Internet.
S’il était grand temps que les services d’accès Internet fassent eux aussi l’objet d’un code de conduite, comme c’est déjà le cas pour les services de téléphonie sans fil et de télévision, les protections prévues au nouveau document annoncé par le CRTC sont pour le moins décevantes. À la lumière des nombreuses plaintes que reçoit chaque année la Commission des plaintes relatives aux services de télécom-télévision relativement aux services d’accès Internet, les consommateurs étaient en droit de s’attendre à mieux d’un document supposément destiné à « répondre à leurs préoccupations ».
Ainsi, au moment de son entrée en vigueur le 31 janvier 2020, les abonnés québécois à un service d’accès Internet ne verront que très peu de changements; plusieurs des protections offertes par le Code se trouvent déjà depuis des années dans la Loi sur la protection du consommateur. S’il était souhaitable que le CRTC s’en inspire, il aurait dû aller beaucoup plus loin, d’autant plus qu’on assiste actuellement au développement de nombreuses mesures de protection intéressantes à l’étranger, ce que n’a pas manqué de lui rappeler UC dans les observations produites en cours d’instance.
Surtout, le nouveau Code sur les services Internet présente des failles fondamentales qui ont de quoi inquiéter.
- Le CRTC a fait le choix d’imposer ce nouveau code uniquement aux 10 plus grands fournisseurs. Il crée ainsi deux classes de consommateurs qui ne bénéficient pas des mêmes protections en cas de problème avec leur fournisseur. Du jamais vu, alors que tous les autres codes du CRTC s’appliquent également à tous les fournisseurs. Le CRTC prétend ainsi favoriser la concurrence en aidant les fournisseurs indépendants à percer le marché, mais il risque surtout de conférer encore un autre avantage aux Bell, Rogers et Vidéotron de ce monde, qui accaparent déjà la majorité des abonnements au pays, et qui pourront dorénavant se vanter d’offrir de meilleures protections à leur clientèle.
- Le CRTC a aussi fait le choix d’adopter à nouveau une vision très réductrice de la protection du consommateur, qui se limite en fait à s’assurer que le consommateur soit informé des conditions de service. Pas question par contre d’encadrer ces conditions, même si des abus sont indéniables sur le marché. Rien n’empêche donc les fournisseurs de continuer à exiger des frais d’utilisation excédentaires exorbitants ou à exiger, dans certaines circonstances, des frais de résiliation anticipée au montant de leur choix… pour autant qu’ils en informent les consommateurs au préalable ! Rien non plus de très contraignant sur les vitesses et sur les prix mis de l’avant de façon incomplète ou trompeuse dans des publicités destinées à attirer de nouveaux clients. Le CRTC se contente d’inviter les fournisseurs à faire preuve de clarté. Pas de quoi être rassurés…
Toutefois, si le document déçoit grandement, il faut tout de même mentionner quelques mesures intéressantes pour les consommateurs québécois, comme la mise en place d’une période d’essai, la remise d’un résumé du contrat au moment de l’abonnement ou encore l’envoi obligatoire d’avis lorsqu’un consommateur approche de sa limite de téléchargement mensuel ou qu’il l’atteint .
Mais ces quelques bonnes nouvelles ne font malheureusement pas le poids face à la grande marge de manœuvre dont le CRTC a fait cadeau aux fournisseurs.
Voir ici le Code sur les services Internet simplifié
Renseignements :
Union des consommateurs
Anaïs Beaulieu-Laporte
Analyste en télécommunications, radiodiffusion, Internet et vie privée
ABeaulieu-Laporte@uniondesconsommateurs.ca
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